Nuada, ou Nuada Airgetlám — littéralement « au Bras d’Argent »
Il est l’un des rois les plus nobles et tragiques de la mythologie celtique irlandaise. Fils d’Eochaid, il règne sur les Tuatha Dé Danann, ce peuple de dieux et de héros à la fois lumineux et redoutables. Mais son histoire illustre un thème cher aux Celtes : même les dieux ne sont pas à l’abri du déclin.
Lors de la seconde bataille de Mag Tured, Nuada mène vaillamment ses troupes contre les Fomoires — ces forces sombres du chaos. Le combat est titanesque, et s’il en ressort victorieux, il en sort aussi mutilé : il perd son bras. Or, dans la société divine comme dans celle des hommes, un roi blessé ne peut plus régner. Son intégrité physique reflète celle du royaume ; le roi et la terre sont unis par un lien sacré. Quand l’un est brisé, l’autre se meurt.
Malgré tous les efforts de Dian Cécht, le dieu-médecin des Tuatha Dé Danann, aucune magie ne parvient à lui rendre son membre perdu. Son bras d’argent, forgé pour lui redonner sa force, reste un substitut imparfait — un symbole à la fois de gloire passée et de perte irréversible. Contraint d’abdiquer, Nuada devient ainsi le roi déchu, victime du destin et des lois immuables du sacré.
Mais sa chute n’est pas vaine. Dans le mythe, elle annonce l’arrivée d’un nouveau héros, Lug Lámfada, celui « au long bras », qui reprendra le flambeau. On peut y voir une allégorie du passage du pouvoir, du jour déclinant vers la lumière renaissante. De fait, certains érudits rapprochent Nuada de divinités célestes diurnes, un dieu du Soleil ou du Ciel lumineux, condamné à s’effacer à mesure que la lumière décroît — un cycle éternel de gloire et de déclin, semblable à celui de Vedius, divinité latine de la clarté déclinante.
Sous ce bras d’argent se cache donc un mythe de transformation : celui du roi parfait devenu symbole de la sagesse blessée. Car si Nuada perd la main du pouvoir, il conserve la grandeur de l’âme — l’humilité d’un dieu qui accepte la loi du monde, et dont la blessure devient lumière.
En somme, Nuada Airgetlám, c’est :
• Le roi guerrier et juste, protecteur des siens.
• L’homme brisé mais digne, sacrifié au nom de l’ordre cosmique.
• Le dieu du jour déclinant, annonciateur du renouveau.
Une figure poignante et solaire, où se mêlent héroïsme, perte et transcendance — car chez les Celtes, même la main d’argent finit par briller comme une étoile.
Nuada
/diancecht